Bruno Le Maire, ministre de l’Économie, souhaite mettre en place une nouvelle disposition législative afin que les grands patrons d’entreprises françaises domiciliés à l’étranger soient contraints de payer leurs impôts au sein de l’Hexagone.
Cette demande s’inscrit dans un climat social compliqué, marqué par les revendications des gilets jaunes en faveur d’une fiscalité plus juste et redistributive. Mais il s’agit en réalité d’une problématique récurrente dans le débat public depuis plusieurs décennies, alors que, selon l’OCDE, l’évasion fiscale génère un manque à gagner évalué entre 30 et 60 milliards par an pour l’État français.
Le gouvernement veut donc passer à l’offensive en intégrant les questions de fiscalité au cœur du Grand Débat National. À la fin du mois de janvier, plus de 5 000 propositions relatives à la fiscalité sur presque 50 000 figuraient dans la plateforme numérique publique créée par le gouvernement.
Le Ministre de l’Économie a d’ores-et-déjà esquissé un début de calendrier : le texte sera publié dans les prochaines semaines. Il n’y a donc pas de temps à perdre. Il ne souhaite pas seulement viser les personnes domiciliées à l’étranger, mais aussi celles occupant un poste de Président Directeur Général, ou Directeur Général de manière plus vaste.
Ainsi, tous les dirigeants des entreprises cotées au CAC40 ou au SBF120 devraient être concernés.
Il s’agirait donc d’une mesure franco-française, qui se passerait d’une éventuelle renégociation des conventions fiscales bilatérales avec les autres pays de l’Union Européenne.
En effet, certains États pratiquent délibérément un dumping fiscal qui nuit à d’autres pays de l’UE, la politique fiscale étant laissée à l’entière compétence de chaque État.
En cas de non-respect de la loi, le gouvernement a également annoncé un alourdissement des sanctions prévues à l’encontre des fraudeurs. Les pratiques d’optimisation fiscale – qui, rappelons-le, ne sont pas illégales – devraient être limitées.
Plus largement, l’ouverture de cette question remet sur la table tout le sujet de la fiscalité des entreprises. Comme leurs dirigeants, les entreprises françaises qui réalisent des profits en France doivent payer leurs impôts en France.
Emmanuel Macron avait déjà rappelé ce principe dans son allocution télévisée du 10 décembre 2018.
D’une part, la réduction du taux d’IS (Impôt sur les Sociétés) sera bien maintenue au mois d’octobre 2019, et l’objectif de le ramener à 25% en 2022 n’est pas remis en cause.
D’autre part, Bruno Le Maire a affirmé sa volonté de créer un IS minimum qu’il juge comme un moyen efficace pour lutter contre les pratiques d’optimisation fiscale des entreprises.
La possibilité de créer un taux de TVA à 0% sur certains produits de première nécessité a également été évoquée par le locataire de Bercy, qui s’est dit ouvert à l’examen d’une telle disposition.
Il est encore trop tôt pour donner une réponse définitive, mais il est fort probable que le gouvernement propose un alourdissement des sanctions pénales, avec une augmentation de la peine de prison pouvant être appliquée par exemple.
Cette déclaration intervient après les soupçons de fraude fiscale et de malversations à l’encontre de Carlos Ghosn, et après son arrestation au Japon à la fin du mois de novembre 2018.
Nous pouvons penser qu’une augmentation des amendes infligées pourrait être votée.
La possibilité d’étendre les interdictions à exercer des fonctions de direction, ou de gérer une entreprise, pourrait être également appliquée.
Cette nouvelle disposition pour mieux encadrer la domiciliation fiscale des grands patrons est massivement soutenue par l’électorat populaire, et s’inscrit déjà dans les ordres du jour du Grand débat national.
Il y a fort à parier que cette mesure suscitera grand nombre d’interrogations, mais aussi de curiosités.
« Nous verrons ce que les Français nous demandent à la fin du grand débat national comme priorité absolue et nous en tiendrons évidemment le plus grand compte » a déclaré Bruno Le Maire.
À cette heure, aucun engagement sur le calendrier n’a été évoqué par le gouvernement.